Jusqu’Ă la derniĂšre goutte
En France, lâagriculture est Ă lâorigine de 58 % de la consommation dâeau du pays, que ce soit pour irriguer les cultures ou pour abreuver les Ă©levages (source : MinistĂšre de la transition Ă©cologique).
Les vagues de chaleur prĂ©coces accentuent les besoins, alors que la recharge des nappes souterraines reste fragile en automne et en hiver. InĂ©vitablement, le sol craque et les plantations grillent sous lâeffet de la chaleur. Ă la fin du mois dâaoĂ»t 2022, quatre vingt treize dĂ©partements Ă©taient frappĂ©s par une restriction de lâusage de lâeau. Lâeau se transforme parfois en or pour les besoins des cultures comme le maĂŻs et le blĂ©, qui ont une croissance limitĂ©e avec le stress hydrique.
Les usages domestiques, industriels et agricoles dĂ©rĂšglent toujours plus le cycle de lâeau. La tension sur lâagriculture se fait ressentir de maniĂšre urgente, Ă un moment oĂč les solutions habituelles de type barrage ont dĂ©montrĂ© leurs limites en termes dâefficacitĂ©. Si la prise de conscience est bien prĂ©sente pour changer les pratiques agricoles concernant la consommation dâeau, les solutions recherchĂ©es apparaissent parfois comme le dernier souffle dâun vieux modĂšle fragilisĂ© par la frĂ©quence des sĂ©cheresses.
Des rĂ©serves dâeau de substitution sortent de terre, comme par magie, pour rĂ©pondre aux besoins de lâagriculture intensive. Ces solutions prennent la forme dite de « bassine » ou « megabassine », dispositifs financĂ©s parfois avec des aides de lâĂtat et dont le principe consiste Ă pomper lâeau, en hiver, dans les nappes phrĂ©atiques. De plus en plus souvent, les PrĂ©fets sont amenĂ©s Ă instruire des demandes dâautorisations de mise en place de ces ouvrages. Ils font Ă©galement face Ă une pluie de sollicitations pour des dĂ©rogations aux restrictions de prĂ©lĂšvements en eau, dans le milieu, en pĂ©riode tendue. Ce qui apparaĂźt pour les demandeurs, dans lâurgence, comme un moyen dâapprovisionnement en eau grĂące Ă des demandes simplifiĂ©es administrativement, reste inacceptable pour une partie de lâopinion publique qui revendique la dĂ©fense du bien commun et la prĂ©servation de la ressource.
La crise climatique qui sâest installĂ©e sous nos yeux nâa pas Ă©tĂ© anticipĂ©e. Pourtant, les circonstances nous forcent Ă changer de braquet : rechercher les fuites du rĂ©seau, limiter lâirrigation de certaines cultures (ex : biocarburants) pour en favoriser dâautres (ex : maraĂźchĂšres, fruitiĂšres), rĂ©utiliser les eaux usĂ©es, sĂ©lectionner des plantes moins gourmandes, favoriser la matiĂšre organique sur les sols, prĂ©server les zones humides, planter des arbres et des haies pour permettre Ă lâeau de mieux sâinfiltrer dans le sol… Lâengagement dans de nouvelles pratiques liant sobriĂ©tĂ© et efficacitĂ© est incontournable pour que notre monde retrouve du sens.
Nos paysan·nes sont confronté·es directement Ă cet enjeu d’accĂšs Ă l’eau. Ils et elles le gĂšrent de façon diffĂ©rente selon leur territoire, leur Ă©quipement et les alĂ©as climatiques. Les amapien·nes sont dans une certaine mesure sensibilisé·es Ă cette question, mais il serait intĂ©ressant de l’aborder plus en profondeur dans les mois Ă venir !
Et d’ailleurs cette annĂ©e, AMAP en FĂȘtes sera placĂ©e sous le signe de l’eau, avec un slogan qui interpelle : « Les AMAP se jettent Ă lâeau, pour AMAP en fĂȘtes ! ». ConcrĂštement, pendant 1 mois (du 18 septembre au 18 octobre 2023), les groupes de citoyen·nes et paysan·nes en AMAP sont invité·e Ă organiser une multitude dâĂ©vĂ©nements sur tout le territoire français. Nos animations (cinĂ©-dĂ©bats, visites de fermes, confĂ©rences, concerts…) permettront dâaborder de nombreux sujets en lien avec lâalimentation durable et lâagriculture paysanne. Ăa coule de source mais dâici-lĂ , de lâeau aura coulĂ© sous les ponts…
par BenoĂźt, amapien et membre du Collectif d’AMAP HDF